Voyage au Nord de la Russie
L'île de Kiji
 

 
L'île de Kiji tire son nom du mot carélien KIJAT qui signifie les jeux. Son relief est assez uniforme, la seule hauteur est le mont Narlin dans sa partie centrale. L'île de Kiji est située dans la partie nord-ouest du lac Onega. C'est par là qu'au 14e siècle passait la voie commerciale reliant les terres de Novgorod avec la mer Blanche. L'enclos paroissial de Kiji servait à l'époque de centre administratif autour duquel se groupaient plus d'une centaine de villages des îles voisines. C'est en 1966 que la décision est prise de faire de Kiji un musée à ciel ouvert réunissant les bâtiments de l'ermitage à d'autres édifices d'architecture russe ancienne qui y ont été transférés. Au 17è siècle Kiji possédait une coutellerie, unique industrie de l'île.

L'enclos paroissial de Kiji, situé sur le mont Narlin s'est constitué en trois étapes : le premier édifice, l'église dédiée à la Transfiguration du Sauveur, a été érigé en 1714 pour célébrer la victoire de l'armée russe sur la Suède. Cette église a été construite sur l'emplacement de l'ancienne église pyramidale détruite par un incendie. Ce sanctuaire est prévu pour la bonne saison, lorsqu'on célèbre les fêtes orthodoxes pendant le bref été nordique. Un demi-siècle plus tard on construisit l'église de l'Intercession de la Vierge qui sera dotée d'un chauffage. En 1874 on érige entre les deux églises sur l'emplacement d'un ancien clocher, un campanile de forme pyramidale. Tous ces édifices sont construits sans avoir recours aux clous, à l'exception des tuiles en bois de tremble qui recouvrent les coupoles. Le seul outil utilisé est la hache. Les découpes faites à la hache obturent les pores du bois et ferment le passage à l'humidité. La forme élancée de ces édifices pareils à des sapins permet également de lutter contre l'humidité, la neige ne pouvant pas s'accumuler sur les toitures. L'utilisation de bois vert contribue aussi à la longévité des bâtiments, la résine faisant barrage à l'humidité (bois de pin à croissance lente riche en résine).

L'iconostase de l'église de la Transfiguration du Sauveur comporte quatre rangées dont la plus intéressante est la rangée dite locale. Dans cette rangée on trouve les icônes telles que les Heures de Saint Zosime et Saint Sabbathius de Solovki, la Transfiguration du Christ et l'Hospitalité d'Abraham avec procession. Les trois rangées supérieures furent exécutées au milieu du 18è siècle et on entrepris la restauration de l'iconostase que l'on a orné de bois sculpté et doré. L'iconostase de l'église de l'Intercession de la Vierge est une reconstitution conforme à l'originale qui était le type d'iconostase le plus ancien. Elle a été mise en place lors des travaux de restauration.

Autour de l'ermitage, on trouve l'église Saint Lazare. Elle a été transférée du monastère de MOUROM en 1960. Elle aurait été construite vers la fin du 14e siècle, mais ses premières descriptions datent de 1629. Cette église est dotée de minuscules fenêtres qui, au lieu d'être verticales, sont horizontales et ne dépassent pas la hauteur d'un rondin. Une autre chapelle, celle de l'Archange Saint Michel à été transférée de Lélikozero en 1961. Le Narthex de cette chapelle est surmonté d'un clocher.

Le musée de l'île de Kiji possède également deux spécimens de moulin. Le moulin à vent construit en 1928 a rejoint le musée également en 1961. Il s'agit d'un ouvrage pivotant sur son axe grâce à un socle peu profondément enfoncé dans le sol de façon à se trouver toujours dans le vent. Le moulin à eau construit en 1875 a été transféré de Bérézovaïa en 1963. Ce type de moulin traditionnel en Outre Onéga est fréquemment mentionné dans les textes des 16e et 17e siècles.

On trouve sur l'île des demeures paysannes : la maison Chtchépine de dimensions modestes et sans aménagements utilitaires (paysan pauvre sans bétail). La maison Sergueïev est la demeure typique paysanne dite en lamelle ; les aménagements utilitaires se trouvent derrière le logis sous le même toit.. Une rampe permet à une charrette attelée de se ranger dans le hangar. La maison Ochevnev, quant à elle, appartenait à un paysan aisé. Trois des façades sont richement ornées, les fenêtres ont des chambranles et des volets.

De nombreux autres édifices ont été transférés sur l'île de Kiji, qui comporte aussi une forge, une grange, des greniers simple, double ou à étage, les bains. Sur l'île de Kiji est exposé l'artisanat populaire carélien et russe du 18e siècle à nos jours. D'autres édifices sont exposés sur les îles voisines que l'on surnomme le collier de Kiji.

Francesca Maine
Photos: Monique Decraene